Revue Etho-logique

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Notes de cours

Éthologie du cheval - Part 1

Université de RENNES, janvier 2004

vendredi 8 avril 2005, par Theodule

Les notes de cours souvent d’une lecture malaisée, voire rébarbative. Aussi, quand Théodule, nouvellement inscrit sur les forums Etho-logiques a proposé ses notes sur l’éthologie du cheval, j’étais dubitative.
En fait, ses notes sont claires, synthétiques et hautement instructives pour tous ceux qui sont intéressés par l’éthologie et/ou le cheval. C’est pour cela que, finalement, je vous les propose à la lecture.

La densité du propos m’a poussée à scinder ce texte en deux parties :
- la première, ci-après, plus axée sur les notions élémentaires sur l’éthologie et le cheval.
- la seconde, dans l’article cité en fin de page, consacré aux problématiques de l’apprentissage.

Bonne lecture
Agnès Maillard


1. QU’EST-CE QUE L’ETHOLOGIE ?

La première définition date de 1854 ; elle est de Geoffroy ST HILAIRE.

L’éthologie est la science de la zoologie qui a pour but d’étudier le comportement des animaux.

QU’EST-CE QUE LE COMPORTEMENT ?

Le comportement peut se définir comme étant l’expression dynamique des
relations dialectiques d’un individu avec son milieu.

Relations dialectiques : existence d’interactions permanentes entre l’individu et son environnement.
Milieu : dépend de facteurs naturels comme la température, l’humidité, etc... mais aussi de facteurs biotiques (congénères, prédateurs, proies).

2. LES BUTS DE L’ETHOLOGIE

CAUSALITES :
QU’EST-CE QUI FAIT QUE L’INDIVIDU OBSERVE À SES COMPORTEMENTS ?
Causes internes : systèmes nerveux, endocrinien, sensoriel.
Causes externes : informations provenant du milieu.

ONTOGENESE :
COMMENT CET ANIMAL A-T-IL PU SE DEVELOPPER JUSQU’A POUVOIR FAIRE CETTE
REPONSE ? (EFFETS DE L’APPRENTISSAGE)

FONCTIONS :
QUELLE EST L’UTILITE DE CETTE REPONSE POUR L’INDIVIDU ?
Finalités à court terme : action directement observable comme manger, boire.
Finalités à long terme : intérêt pour une espèce d’occuper un terrain à un instant T.

PHYLOGENESE :
POURQUOI L’ESPECE OBSERVEE A-T-ELLE RESOLU LE PROBLEME DE SURVIE DE
CETTE MANIERE
 ?

3. LES METHODES

3.1. Formaliser au mieux l’objet observé

Analyse quantitative : définitions des unités comportementales ou actes moteurs
Enchaînement des actes : séquence comportementale
Répertoire ou éthogramme : monter une liste des comportements avec un certainnombre de précautions et en respectant certaines règles : observer objectivement et se garder des a priori ; faire la différence entre l’apparence/le mouvement/la posture (structure) et les conséquences (ex : différence entre allumer la lumière et appuyer sur le bouton).

Un comportement, à finalité identique, peut avoir des structures différentes comme marcher/brouter/boire.
Il peut exister des variations individuelles à l’intérieur d’une même espèce.
Enfin, un comportement apparemment identique peut avoir des finalités différentes : exemple de l’immobilité qui peut signifier observation d’un prédateur ou dormir.

L’observation sur le terrain prendra en compte le comportement : observation du cheval, noter les différents états et les « catégoriser », faire des schémas - dessins.
On parlera donc de catégories d’unité et de sous catégories. Exemples de catégories : les déplacements, les interactions sociales, les activités de maintenance, les activités liées à l’alimentation, les activités d’immobilité, les activités d’exploration, les vocalisations, les distances... Exemples de sous catégories dans les interactions
sociales : la position de l’encolure, la position des oreilles, de la queue... dans les allures : le pas, le trot (rare), le galop (rare).
Ce qui est intéressant, ce sont les combinaisons d’unités comportementales, ex : encolure basse + regard dirigé + oreilles couchées = menace. C’est ce que l’on appelle un pattern.

3.2. Les méthodes d’échantillonnage

Une règle d’échantillonnage correspond au choix de qui et de quand.

Plusieurs types sont possibles :
- Ad libitum : soit à volonté. Il n’existe aucune contrainte. On note tout ce que l’on peut sur le nombre de sujets que l’on veut.
Limite de la méthode : on observe plus certains individus que d’autres.
Avantage de la méthode : permet de se familiariser à l’observation
scientifique.
- Echantillonnage de l’animal focal : On observe un animal pendant un temps précis. Il est préférable de choisir l’animal avant l’observation.
- Echantillonnage par scrutation ou « scanning » : on observe l’ensemble du groupe à intervalle régulier.
Limite de la méthode : on observe des états plus que des actions : « ils sont assis plutôt qu’ils s’assoient ».
- Echantillonnage du comportement ou d’une séquence du comportement : on observe l’ensemble des individus et on s’intéresse à l’occurrence de certains comportements.

3.3. Les méthodes de notation

- La notation continue : on note chaque début et chaque fin de comportement.
Avantage de la méthode : permet le minutage des séquences
comportementales.
- La notation distribuée dans le temps : Il en existe de deux types :

La méthode par pointage ou TOP : on observe l’individu choisi à un instant T (ou point d’échantillonnage) et l’on note son comportement.

La méthode du tout ou rien : on observe l’individu en permanence et l’on note au point d’échantillonnage, si le comportement étudié se produit.
Limite de la méthode : c’est une méthode coûteuse mais utile en cas d’activité répétitive courte.

4. LE CHEVAL AU NATUREL

LA DOMESTICATION N’ALTERE PAS PROFONDEMENT LES
CARACTERISTIQUES COMPORTEMENTALES

NOTION DE DOMAINE VITAL :
Il est composé :
- de zone d’abri ;
- de zones d’alimentation ;
- éventuellement d’un point d’eau ;
- de zones de repos.
Le cheval est très attaché à son domaine vital : notion de sécurité.

NOTION DE RYTHME :
Dans la journée, l’ensemble des zones n’est pas occupé en même temps. 80% de la journée est passée à se déplacer au pas (50% la nuit).
Le cheval est un animal d’habitudes ; c’est un animal de synchronisation : il fait les mêmes choses au même moment dans la journée.
La somnolence n’est pas du sommeil car ils réagissent au bruit (il faut 10 fois plus de bruit pour les réveiller dans un « vrai » sommeil).

Peu d’allures rapides dans la nature.
Peu de temps consacré au jeu.
Sur 24h : 13 à 14h d’alimentation, 2h au pas, 5-6h au repos, et 2h d’observation.

NOTION DE REGIME ALIMENTAIRE :
Le cheval au pré a besoin de diversité dans l’alimentation : plusieurs sortes d’herbes, de graminées, donc pas de mono nourriture. Si l’on a des prairies naturelles, les conserver à cause de cette bio-diversité.
Ne pas oublier que le cheval est un animal de terrain pauvre.
Le cheval est opportuniste, il peut manger de tout.

NOTION DE VISION CHEZ LE CHEVAL :
Il distingue : le rouge, le jaune, le vert et le bleu.
Sa vision nocturne est supérieure à celle de l’homme ; il discrimine les formes (triangle, cercle, carré) ; il distingue moins les détails que le chien, le cochon ou même le mouton.

Il relève la tête pour ajuster sa vision à distance.
Grande vision périphérique.
Pour la vision binoculaire de près, a besoin également d’ajuster : mouvements de tête de haut en bas.

NOTION D’AUDITION CHEZ LE CHEVAL :
Le cheval couvre de 16 à 32 kHz alors que l’homme est performant à hauteur de 4 kHz. Il couvre par conséquent une large gamme mais n’a pas de fréquence préférée.

NOTION DU TOUCHER CHEZ LE CHEVAL :
Le cheval a des récepteurs sensoriels sur tout le corps.

SOUVENT L’ENVIRONNEMENT INDUIT UN COMPORTEMENT

Commentaires sur les observations « terrain » :
Il y a les comportements agonistiques = comportements agressifs/offensifs
(menaces, pousser, tentative de ruade, tentative de morsures, morsures) + les
comportements de distanciation (évitement, éloignement et fuite).
La dépendance sociale d’un cheval est une variable individuelle.
Les interactions sociales en temps normal, sont finalement très rares.
Les situations de dominance sont aussi très rares.
Le leader est rarement le dominant. Qu’est-ce que le leader : celui qui déclenche le mouvement, une action.
Il est souvent difficile de déterminer la hiérarchie dans un groupe : sur un groupe stable, ce sont les activités d’évitements qui vont renseigner.
Ce qui semble compter le plus, ce sont les affinités (plus que les relations
hiérarchiques). Par contre on ne sait pas ce qui détermine les affinités (souvent les couples sont de même sexe, ou même âge...).
La communication se fait essentiellement de façon visuelle à l’aide de séquences comportementales (tout un cheminement). Ce cheminement est toujours progressif.
Le cheval sait ce qu’il fait. Il est très précis dans ces « gestes » : s’il ne veut pas toucher, il ne touche pas. NDLR : « s’il te touche c’est que tu n’es pas reconnu comme évitable : il te néglige ».

La dominance peut être caractérisée par la capacité à monopoliser les ressources.

L’expérience sociale du cheval est déterminante : la meilleure façon d’éduquer un poulain est de le laisser au pré avec des « anciens ».
Introduire un cheval nouveau dans un pré peut amener des conflits liés aux
problèmes de ressources. Il faudra donc faire en sorte qu’il y ait de la nourriture pour tout le monde et ainsi dévier l’attention des « anciens ».

A suivre...

Suite dans l’article Éthologie du cheval - Part 2


Notes prises durant le module d’éthologie du cheval, dispensé par l’université de RENNES à la station biologique de Paimpont, sur une durée de 40h, par Martine HAUSBERGER (chercheuse au CNRS) et Marie-Annick RICHARD (professeur à UFR Sciences de la vie et de l’environnement)